
Le Premier ministre hongrois possède désormais les pleins pouvoirs, officiellement pour “protéger le pays” contre la pandémie du Covid-19. À l’heure où l’Europe est barricadée et sans moyen d’intervention, ce prolongement de l’état d’urgence sanitaire apparaît comme une porte ouverte à la dictature dans l’UE.
Dictature : régime politique dans lequel le pouvoir est détenu par une personne, ou par un groupe de personne, qui l’exercent sans contrôle, de façon autoritaire – dictionnaire Larousse
C’est ce qu’il vient de se passer en Hongrie lundi 30 mars.
Le Premier ministre Viktor Orbàn a fait voter par sa majorité de droite nationaliste le prolongement d’une loi d’urgence sanitaire, qui avait été adoptée le 11 mars. Celle-ci stipule que le gouvernement pourra légiférer par décret, peu importe le sujet. Les élections pourront être suspendues, le gouvernement pourra déroger à n’importe quelle loi, le tout pour un temps indéfini.
Une dictature à l’assaut du Coronavirus ou de la démocratie ?
Avec ce vote, Viktor Orbàn est libre de prendre les mesures qui lui chantent. Des dispositions qui inquiètent les membres de l’opposition. “Monsieur le Premier ministre, c’est le virus ou c’est nous, l’opposition, que vous voulez éliminer ?”, a interrogé, Bertalan Tóth, président du MSZP (parti socialiste) selon Libération. “Ces accusations n’ont aucun sens, a rétorqué Santho Miklós, un proche du pouvoir, directeur du Centre pour les droits fondamentaux. Pourquoi diable le gouvernement voudrait-il se passer d’un Parlement où il a la majorité des deux tiers des sièges ?”.

La Hongrie comptabilise à ce jour 447 cas confirmés de Covid-19 et 15 morts. En revanche, les autorités refusent de communiquer les chiffres de l’épidémie en province. La loi d’urgence sanitaire prévoit des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison en cas de diffusion de fake news. Sous-entendu, si un journaliste ou une institution communique d’autres chiffres que ceux annoncés par le gouvernement, ils sont susceptibles de purger une peine en prison.
Et l’Union Européenne dans tout ça ?
Presque tous les pays membre de l’UE sont touchés par la crise sanitaire. Italie, Espagne, France, Allemagne, les poids lourds des 27 tentent d’endiguer la pandémie qui met à mal leur système médical. La seule arme que possède l’UE est une arme économique. Mais dans ce contexte, elle paraît dérisoire pour lutter contre une dictature en Hongrie.

Avec des fermetures de frontières, des armées nationales qui sont mobilisées dans les pays les plus touchés par le Covid-19, l’Union Européenne dévoile quelques failles institutionnelles.
Après le vote du Parlement hongrois, David Sassoli, le président du Parlement européen a déclaré : “Nous ne pensons pas que dans ces situations de crise, la démocratie devrait être suspendue”. Pour faire partie de l’Union Européenne, un Etat doit respecter trois critères. L’un deux stipule que le pays doit posséder un “système démocratique stable”.
Lucie PICCARD